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Ces deux entretiens sont d’autant plus intéressants qu’ils se situent l’un en automne 2007 avant la crise économique, l’autre en fin 2008 au sein de la crise : comment l’art résiste-t-il ? dix ans après (en 2018), ces propos gardent valeur de leçon ! pour mieux comprendre la situation de l’époque, voir "sur 20 ans, l’art aura-t-il été une affaire ?"
> Almanart : collectionner l’art, est-ce un investissement ?
> Martin Guesnet : c’est même un investissement total : intellectuel, en temps, en argent !
Un effort conséquent qu’il faut comprendre dans un esprit patrimonial, car l’effet de levier ne se fait pas avant 3, 5, voire 10 ans ; mais considérer en priorité le rendement correspond plutôt à une approche professionnelle, moins à celle d’acheteurs particuliers. Ceux-ci étudient le catalogue, viennent voir l’exposition, demandent conseil... une collection faite par passion est souvent captivante mais si c’est un moyen de domination elle peut devenir ennuyeuse
> At : auriez-vous quelques conseils en ce sens à donner à l’acheteur, dans cette ambiance de spéculation trop rapide ?
> M. G. : > d’abord ne pas prendre d’artistes trop locaux, ou très politisés, ou faisant avant tout un autre métier : il doit s’y consacrer à plein temps d’autant qu’être un artiste professionnel, médiatique, communicatif, fait désormais partie du job !
> être un "amateur professionnel" : analyser, se documenter, réfléchir (même avec passion) car maintenant le choix est devenu trop diversifié pour tout voir, tout savoir
> faire appel à un expert, certes, mais la question est de savoir lequel, moi je ne connais pas tout... s’appuyer sur un réseau personnel, qui se constitue progressivement
> faire attention aux nombreux pièges : des faux, de mauvaises pièces (même un grand artiste n’est pas toujours excellent), le problème de la signature (qui peut varier dans le temps), celui de l’authenticité…
> enfin, se poser la question : pourquoi donc tel tableau "tient" et pas cet autre ?
> At : fréquenter des artistes, est-ce une bonne approche ?
> M. G. : oui, mais je ne suis pas sûr que les achats directs aux artistes soient avantageux, car il n’y a pas plus séducteurs qu’eux ! Si le désir de contact avec l’artiste est légitime, l’investisseur doit choisir son approche : soit par l’oeuvre, soit par l’artiste ; or parfois l’homme est intéressant mais l’oeuvre l’est moins, alors la démarche d’investissement est plus hasardeuse
> At : y a-t-il des risques, des difficultés classiques ?
> M. G. : disons qu’il y a des domaines, des genres, où les cotes sont déjà trop hautes et d’autres où elles ne sont pas encore à maturité, il faut donc les connaître ; cela dépend des artistes eux-mêmes ; par exemple Gérard Fromanger qui aura été très engagé politiquement est actuellement moins sur le devant de la scène que Erro (ndlr : qui s’est aussi adapté aux courants actuels avec un style assez BD), or ce sont tous les deux de très grands peintres
> At : n’y a t-il pas parfois des amuseurs publics dont la cote, la mode une fois passée, risque de retomber ? par exemple Hyber et Koons n’ont-ils pas parfois abusé en ce sens ?
> M. G. : ces "amuseurs" comme vous dites sont parfois de grands artistes, il faut les voir plus globalement : d’abord en tenant compte du contexte de leur création et ensuite les juger sur plusieurs années, c’est un choix complexe. Et l’époque de production d’une oeuvre est un facteur important ; prenons par exemple les Nouveaux Réalistes qui vont jusqu’aux années 80, la période 60-65 a été la plus importante au point de vue création : il y a des oeuvres historiques, d’autres pas.
> Almanart : 2 ans plus tard, avec une fin d’année 2008 tombée dans le mou : pensez-vous que la conjoncture devienne extrêmement difficile avec moins de transactions et des taux d’invendus supérieurs à 50% ?
> Martin Guesnet : je ne pense pas à ce point, chez nous au 1er semestre les salles ont été pleines, la demande était là, les taux de ventes de l’ordre de 60-70% étaient normaux mais en fait, c’était en 2007 que des taux de 80-90% ont été exceptionnels grâce à quelques grandes ventes comme la dispersion Breton
> At : dans cette conjoncture difficile, quels sont les artistes français qui ont encore un bon potentiel ?
> M. G. : par exemple, la Figuration Narrative est encore bien en deçà, même avec un Monory vendu à 92’000€ en octobre 2007 chez nous. Chez les Nouveaux Réalistes il y a un énorme potentiel, surtout chez les affichistes (Villeglé, avec sa rétrospective à Beaubourg fin 2008). Même en Figuration Libre où c’est Combas qui aura surtout fait le marché : ses oeuvres historiques devraient atteindre 100’000€, ainsi que d’autres comme Boisrond qui sont encore en retrait faute d’être soutenu par une galerie. Pour l’Abstraction Lyrique le marché s’est réveillé et construit à l’occasion de l’exposition au Sénat l’Abstraction Lyrique en été 2006 ; elle intéresse aussi des collectionneurs Allemands et Anglais
> At : et les artistes étrangers ?
> M. G. : les Russes ont un potentiel élevé, bien soutenus par des collectionneurs ou acteurs privés plutôt que par des lobbies. Du côté de la Figuration Allemande, pour des artistes comme Kippenberger ou Oehlen (dont la qualité est moyenne pour le prix) c’est déjà trop tard, mais ce n’est pas le cas de Meese par exemple. Et il y a des origines peu explorées, comme l’Afrique, où des artistes connus comme Toguo ou Samba sont très bas
> At : l’avenir des jeunes français ?
> M. G. : est optimiste car il y a une floraison de jeunes de bon niveau, la Fiac a fait un excellent travail pour dynamiser ce marché ; je le vois aussi par les efforts qui sont fait au sein de Culture France pour élaborer une stratégie de développement pour valoriser les artistes français
> At : du côté des entreprises mécènent ou qui interviennent dans l’art ?
> M. G. : on est encore très en retrait, en France où pratiquement seul Cartier a un rôle important ; il y a aussi des collections internes comme celle de la Société Générale qui sont achetées dans les galeries, ce qu’il faut distinguer du mécénat.
merci de ces deux leçons passionnantes !
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