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L’Argent dans l’Art (fin 2023) montrait les relations ambigües et omniprésentes entre l’art et l’argent dans l’art plastique occidental, imbriquées dans l’Histoire de notre civilisation ; la monnaie est "un pont entre le présent et le futur" disait John Maynard Keynes, justifiant une filliation chronologique ; et la question de la valeur de l’art se pose particulièrement maintenant que les ventes aux enchères battent des records financiers. Voir en bas de page les liens s’y rapportant. |
"je t’aime moi non plus"* |
* : chanson de Serge Gainsbourg, 1969, qui n’a pas hésité en 1984 à brûler un billet de 500F à la TV, protestant de son imposition |
Salvador Dali et Gala ORTF Pierre Cardinal 1961
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Barbara Kruger I Shop 1990 CollFleiss Monnaie moyen
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> par cette oeuvre efficace et simple : "j’achète, donc j’existe", Barbara Kruger nous rappelle l’égocentrisme qui peut motiver le collectionneur
> côté artiste, c’est pareil : Andy Warhol était fasciné par l’argent (comme la célébrité qui va avec) : "gagner de l’argent, c’est de l’art, et faire de bonnes affaires, c’est l’art suprême" ; actuellement il y en a bien d’autres : par exemple Takashi Murakami ou Jeff Koons multiplient les gadgets et goodies improbables, comme s’ils en avaient réellement besoin...
> "l’argent ? idiot de ne pas en profiter" affirme Dali en 1961 à Cadaquès, méritant l’anagramme Avidadollars émis par André Breton en 1940 pour moquer son avidité (document INA) |
> "je voudrais vivre comme un pauvre, avec beaucoup d’argent" |
Face à une oeuvre, le collectionneur pense-t-il à sa valeur sur le marché ou à sa valeur artistique au regard de l’histoire de l’art ? sans doute aux deux ; car si l’art et l’argent sont réunis par leur origine sacrée, il le sont aussi par le fétichisme à leur encontre ;
mais des antinomies subsistent : si la monnaie normalise les échanges, au contraire l’imprévisible création est instable ; et si l’une tient sa force par la quantité, l’autre l’est par sa rareté ; cela explique que le collectionneur d’art soit tiraillé entre la valeur artistique de l’oeuvre convoitée et sa bonne intégration dans son patrimoine
déjà, c’est aux liens entre la femme et l’or que s’adressent les mythologies grecque et romaine : par exemple la pluie d’or -semence de Zeus- dans le mythe de Danaé, ou l’allégorie de la femme corrompue vendant son corps lorsque l’or se transforme en monnaie ; le mythe, prétexte pour peindre un nu sensuel...
> Tracey Emin évoque le mythe de Danaé quand elle brasse l’argent vers son son sexe tandis que la main gauche fait allusion à la maternité Tracey Emin
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16ème siècle la Réforme vient infléchir ces thèses culpabilisantes, condamne le "commerce des indulgences" et distingue le bon et le mauvais riche
> Simon Vouet met en scène ce combat entre l’amour céleste et l’amour terrestre Simon Vouet
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Pendant la révolution industrielle du 18è siècle, l’économiste Adam Smith définit le libéralisme où la valeur d’un bien dépend de son seul temps de production, où le travail enrichit la nation, où la richesse d’un homme est sa capacité à acheter donc générer du travail ; la monnaie est un instrument d’échange et de pouvoir. Les besoins de l’industrie en capitaux ouvrent la voie du capitalisme ; pour que les entreprises puissent accélérer leurs financements, le Palais Brongniart (la Bourse) ouvre en 1826 ;
en art dans les années 1870 le marchand Paul Durand-Ruel applique ce principe : il emprunte aux banques pour acheter en exclusivité aux artistes en spéculant sur leurs futures cotes, qu’il stimule. Cela en application de la théorie de Léon Walras publiée en 1874 qui traite de l’équilibre du marché : la valeur prend en compte, non plus la seule quantité de travail, mais aussi le désir subjectif et la satisfaction du consommateur ; il introduit la notion de rareté ; mais le pari de Durand-Ruel fut osé car il défendait les impressionnistes, dont les oeuvres ne valaient rien pour un public encore attaché à la "quantité de travail"
au 20è siècle les avant-gardistes désacralisent l’art et eux-mêmes en tant qu’artistes : Marcel Duchamp conteste la valeur du travail artistique par ses ready-made (1913), André Breton se révolte avec le surréalisme (1920), Yves Klein vend du vide (1959), Andy Warhol multiplie ses Dollar Bill Paintings (1962) et Arman ses rebuts (1970), ORLAN vend ses baisers d’artiste pour 5 francs (1977), Joseph Beuys peint Kunst = Kapital (1980).
Aujourd’hui le paradoxe est que les artistes se moquent volontiers des vanités spéculatives des collectionneurs mais lorsqu’ils atteignent la célébrité, de Dali à Jeff Koons ils ne regrettent pas d’en profiter...
< parfaite conclusion de ce petit panorama des jeux d’argent et d’art : ce squelette laqué or, un geste d’absolue vanité ! en 1972, dans Contrat pour un Corps, Michel Journiac propose à l’amateur de transformer son squelette en oeuvre d’art ; voir l’explication par Marie Chênel
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plus d’infos : |
> l’exposition L’Argent dans l’Art à La Monnaie de Paris |
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< encre et lavis de René Leidner |
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